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Frédéric LAVAL, Conseiller Départemental des Hautes-Pyrénées
Frédéric LAVAL, Conseiller Départemental des Hautes-Pyrénées
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2 juin 2006

Réintroduction de l'Ours : Mission du Conseil Général

oursbrun1Intervention de Frédéric laval

La mission du Conseil Général consacrée à la réintroduction de l'ours dans les Pyrénées mettait son rapport à discussion aujourd'hui au Conseil Général en séance plénière.


On peut trouver l'intégralité du texte (sans les annexes) à l'adresse suivante : Rapport Ours du Conseil Général, ou Lourdes-Infos.


Vous trouverez ci-dessous : le texte de mon intervention en séance et le contenu de la conclusion du rapport.


Début de l'intervention


Je félicite la mission pour le travail qu’elle a fourni et notamment sur un soucis permanent d’écoute, de pesée et de présentation des arguments avancés par les uns et par les autres.

Cependant il m’a semblé remarquer que dans la quête d’objectivité s’est glissée ici et là une certaine subjectivité dans la forme et dans le fond.

Les photos par exemple : page 4 on voit les membres de la mission, page 17 on voit des moutons et page 71 on voit des maisons. Rappelons le titre du rapport : « La réintroduction de l’ours dans les ours_brun_petit_1Pyrénées ». Et aucune photo d’ours !

Site internet de la page 27 : L’adresse est mauvaise, est-ce un fait exprès ?  : http://www.ours.ecologie.gouv.fr

Critique récurrente : Etre accessibles au plus grand nombre. Il faut mettre en dernière page la liste des sigles utilisés ou alors traduire entièrement le sigle à sa première utilisation.

Arrêt du Conseil d’Etat page 29 : « le CE a rejeté la requête de réparations des dommages causés par les ours réintroduits en 1996 et 1997 ». Une telle phrase m'a choqué : L'Etat ne rembourserait pas les dégats causés par l'ours ? Je suis donc allé chercher la requête du Conseil d’Etat (qui est datée du 20 avril et non du 4 avril dans le document officiel que j’ai trouvé).

Cet arrêt explique que les requérants demandaient tous 500 euros non parce que les ours avaient commis des dommages à des moutons ou des vergers ou autres mais uniquement pour dommages et intérêts liés à l’introduction qu’ils estimaient illégale de l’ours.

Ce n’est pas du tout ce que l’on comprend à la lecture du rapport ! J’aimerais donc que ce soit précisé.

Ariège : Page 44 on apprend que 75% des dégats liés à l’ours ont lieu en Ariège. On peut préciser que les bergers de l’Ariège refusent largement les aides à la protection. Là où ces aides sont utilisées les dégâts sont fortement réduits voire inexistants (page 46).

Ours prédateur : Il est dit page 54 que l’ours est capable d’endommager les cultures ou les vergers, de piller les ruches et surtout de s’attaquer au bétail.

Cette présentation fait le l’ours le prédateur extrême. Pourtant nous savons que pour le bétail, les cultures, les vergers il y a des dangers plus importants que l’ours entre les maladies, les chiens de berger, les chiens errants, les sangliers, les dérochements dus aux orages et que sais-je encore. Nous sommes dans un rapport de 1 à 100, 1 pour l’ours, 100 pour le reste.

Je reprends maintenant les conclusions du rapport :

Autant je suis malgré tout favorablement impressionné par ce travail, autant je suis surpris par la conclusion, qui me laisse complètement sur ma faim, tant les soucis d’objectivité semble s’être évaporés pour ne retenir finalement que les arguments contre qui, mis bout à bout, donne un sentiment de parti pris qui me met mal à l’aise.


(Figure maintenant en gras le texte de la conclusion et en clair la suite de mon intervention )

L’espèce ursine : Considérant que l’ours brun n’est pas menacé au niveau mondial ni au niveau européen. La souche pyrénéenne quant à elle s’est éteinte en 2004, avec la mort de Cannelle.

Si chaque pays raisonnait ainsi, seul le dernier serait tenu de conserver une population de chaque espèce. Pourtant on peut voir (grippe aviaire, la vache folle) que des maladies, des épidémies, peuvent détruire entièrement les animaux d’un territoire donné. Il faut donc quand c’est possible multiplier les lieux de présence pour permettre à notre espèce européenne d’ours de survivre au cas où.

… ce qui conduit à une conclusion inverse de celle énoncée !

Le biotope : Considérant que le biotope des Pyrénées a changé avec l’évolution des activités humaines. Sa modification, en forme de retour en arrière, n’est pas raisonnablement envisageable.

Je n’aime pas le terme de « retour en arrière » qui sous-entend que la tradition c’est le retour en arrière.

Mais surtout ce considérant n’en est pas un c’est une conclusion à lui tout seul.

Le mot « raisonnablement » sous-entend une analyse fine, du raisonnement, de la raison.

Je n’ai pas vu la raison beaucoup s’exprimer dans ce considérant il est donc tout à fait inapproprié.

Le rapport critique la caricature et conclut lui-même en caricaturant.

moutons1Le pastoralisme : Considérant que dans sa double dimension d’activité économique (en terme de production) et d’activité environnementale (en terme d’entretien de l’espace montagnard), le pastoralisme subit une contrainte supplémentaire avec la présence d’un prédateur comme l’ours. Considérant que les politiques de soutien au pastoralisme sont de fait contrariées par la réintroduction de l’ours.

Aujourd’hui, voilà au moins un point sur lequel nous sommes tous d’accord ici, le pastoralisme est en danger et il faut faire en sorte de le pérenniser sur le massif pyrénéen.

Le problème du pastoralisme tient dans la difficulté de rentabiliser une production par essence extensive et dont un des rôles principaux est l’entretien de paysages ouverts.

Le problème fondamental à mon avis est la non prise en compte du caractère spécifique de l’agriculture de montagne, dont le rôle paysager et environnemental est fondamental, et de sa rémunération pour ces fonctions spécifiques.

Comment considérer que le pastoralisme pyrénéen puisse être concurrentiel dans le cadre d’une économie de marché mondial, si l’on aligne que des critères de rentabilité.

C’est bien un véritable plan de soutien et de sauvegarde du pastoralisme, réclamé par les éleveurs, qui doit être mis en place, indépendamment du problème de l’ours. Mais, le fameux plan sylvo-agro-pastoral se fait toujours attendre.

Mais là où je ne souscris pas, c’est de déclarer que l’ours va mettre en péril le pastoralisme. Le pastoralisme est en péril (On a d’ailleurs déjà perdu 19% d’éleveurs transhumants en 10 ans – voir page 18), mais pas à cause de l’ours. Tout au plus, l’ours créé une contrainte supplémentaire.

Résoudre la question de l’ours en programmant son extinction à terme n’est pas pour moi une solution.

Imaginons que l’ours n’existe plus et que toutes les aides qui accompagnent l’ours soient par conséquent supprimées, ce qui représente 1,6 Millions d’euros (On parle de 2,25 page 41) sur le massif pyrénéen, je ne vois pas en quoi la situation du pastoralisme s’en trouvera financièrement améliorée.

S’attaquer donc à un problème connexe, l’ours, qui n’est pas responsable des principales difficultés du pastoralisme, est pour moi une erreur.

Une montagne vivante : Considérant que les élus développent des politiques volontaristes pour préserver une montagne vivante, libre d’accès, source d’épanouissement, de découverte et support de l’activité touristique. Considérant que dans ce contexte la présence de l’ours est incompatible avec un tourisme de masse.

La montagne est un écosystème (pour faire vite) très fragile, le tourisme de masse méritera certainement un jour d’y être encadré.

On parle de la possible incompatibilité entre le tourisme de masse et la présence de l’ours ; mais a-t-on évalué l’impact négatif sur le tourisme d’une appréhension par la population française de pyrénéens perçus comme hostiles à l’ours.

HPTE ne dispose d’ailleurs pas d’études sur la perception de l’ours par les clientèles touristiques dit-on page 69.

Je ne comprends donc pas la conclusion de ce considérant puisqu’elle est incompatible avec notre connaissance actuelle.

L’homme d’abord : Considérant que l’homme doit être au cœur de toute politique publique et placé avant l’animal. Considérant que le maintien de la biodiversité c’est d’abord la possibilité pour l’homme de vivre et travailler sur les territoires.

Curieuse définition, en effet de la biodiversité. Contraire en tout cas à celle qui nous est proposée page 52.

Surtout que, parallèlement à la disparition progressive de l’Ours, on constate aussi celle de l’agro-pastoralisme.

Il serait préférable d’envisager de sauver les deux plutôt que de répondre de manière dichotomique : Entre l’homme et l’ours je choisis l’homme. Ceci est une évidence qui ne répond pas à la question.

Le déclin de l’ours et du pastoralisme ont la même cause :  l’ultralibéralisme et le règne de l’économiquement utile.

Si l’on est incapables de créer les conditions de survie de l’ours, je ne vois pas comment on pourra sauver le pastoralisme.

concertation1La concertation : Considérant que le mode de concertation engagé par le gouvernement est contesté par la majorité des élus, des chasseurs, et des acteurs économiques (agriculture, tourisme, forestiers,…).

Voilà au moins un  point que je partage et je vais y revenir.

L’acceptation sociale : Considérant que les conditions de l’acceptation sociale n’ont pas été réunies dans le département.

Un seul sondage est cité dans le rapport, celui commandité par l’Adet. Pourtant j’en connais au moins deux autres qui ont tous conclu en faveur de la restauration de l’Ours, y compris dans la zone montagne.

Quand bien même on les critiqueraient. L’acceptation sociale ne se mesure pas seulement à la présence de 5000 personnes ici ou 2000 là. Ces chiffres doivent être pris en compte mais ils ne peuvent nous conduire à une conclusion générale.

La mission, à la majorité, propose que le Conseil Général des Hautes-Pyrénées :

- Se prononce contre la réintroduction de l’ours,

- Demande l’abandon du plan de restauration et de conservation 2006-2009

Un tel travail peut-il aboutir à la seule conclusion, brute, d’être contre la réintroduction de l’ours dans les Pyrénées. Pas contre, pour l’instant, contre le plan de Nelly Olin, non ! Contre tout simplement. Comme on ne peut être contre la fermeture de GIAT ou d’Alcan, sans chercher des solutions par ailleurs ou sans tenter de minimiser les impacts dévastateurs de telles catastrophes industrielles, on ne peut à mon avis être contre la réintroduction de l’ours.

Car ce qui me mets mal à l’aise, c’est l’implication de cette conclusion.

Je suis contre le plan de Nelly Olin. Mais bien plus que sur son contenu, c’est sur la forme que je m’insurge, sur le passage en force du gouvernement qui méprise les français, comme nous l’avons vu avec le CPE.

La méthode utilisée est déplorable et détestable, mais ne comptez pas sur moi pour jeter le bébé avec l’eau du bain. Ce n’est pas parce que je condamne ce gouvernement que je condamne l’ours.

J’aimerais que les esprits se calment et que l’on puisse parler des conditions de pérennisation du pastoralisme et des conditions de possible cohabitation avec l’ours.

Je ne peux souscrire aux conclusions de ce rapport, qui condamne l’ours et par conséquent, qui ne fait aucune proposition concrète pour créer les conditions d’une cohabitation entre l’homme et l’ours.

Pourtant des propositions sont faites ou sont suggérées à l’intérieur de ce rapport :

-Des propositions qui émanent des chasseurs page 65 sur des moyens humains, sur des plans de réintroductions propositions1d’ongulés sauvages

-En terme de tourisme page 69 sur la communication touristique institutionnelle

-Sur le rôle économique et environnemental des éleveurs

-Sur la concertation avec les élus qui représentent des territoires en difficulté page 74 et l’ensemble des personnes que la mission  a rencontré

-Sur la responsabilité pénale des maires

-Et on pourrait ajouter la nécessité d’un vote de habitants de tout le masif

Ces sont des propositions qui manquent à ce rapport et ce n’est pas non plus un choix POUR ou CONTRE qu’il fallait faire mais plutôt COMMENT FAIRE maintenant que l’ours est là.

Si au cours de nos discussions aucune modification n’est apportée à ce rapport dans un sens qui répond à quelques unes de mes remarques je voterai donc contre ce rapport.

J’attends donc que vous soyez, mes chers collègues, prêts à la concertation des idées et aussi au consensus entre nous pour concilier des points de vue qui me semblent conciliables (le rapport le dit lui-même à la fin).

Notre rôle ici n’est pas de choisir son camp POUR ou CONTRE mais d’apaiser les tensions et surtout de proposer des solutions qui ne soient pas manichéennes.

fin de l'intervention


Vous l'avez compris la conclusion était opposée à la réintroduction de l'ours.

urne1Le résultat du vote a été le suivant :

Ont voté POUR le texte ("Contre la réintroduction" donc !) = 21 dont 8 socialistes

Ont voté CONTRE le texte : 9 -- Marie-Josiane Bédouret (PS), Gérard Boube (PS), Jean-François Calvo (UMP), Jean-Pierre Dubarry (PS), Bruno Lapeyre (UMP), Frédéric Laval (PS), Robert Marquié (PS), José Marthe (UMP)

Se sont abstenus 2 : Georges Azavant (PRG), Maurice Loudet (PS)

Etaient absents 2 : Jean Guilhas (PS), Claude Miqueu (PRG).

Photos :

La photo des moutons vient de : http://jlhuss.blog.lemonde.fr/photos/uncategorized/moutons.jpg

La photo de l'urne : http://www.faidutti.com/democrazy/urne.jpg

La photo sur les propositions : http://www.paris20.pcf.fr/IMG/arton178.jpg

La photo sur la concertation : http://www.villenavedornon.fr/upload/MEDIATHEQUE-CHAMBERY/concertation.jpg

La petite photo d'ours : http://medias.francetv.fr/bibl/url_images/2005/03/17/image_9006893_96_72.jpg

La grande photo d'ours : http://www2.toulouse.iufm.fr/foix/iufm_foix/Productions02-03/fc/francais/ours/images/oursbrun1.jpg


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